Finance&Gestion 381 (Juillet/Août 2020)

Gestion des risques et contrôle interne

Expertises

Si on reste dans le concret et se penche sur ces théâtres d’opération où sont le plus susceptibles d’être commis les actes délictueux – les pays émergents – on ne manquera pas de relever qu’un défaut structurel d’information juridique et micro-éco- nomique fiable, actualisée, centra- lisée et accessible les caractérise. Si l’obtenir par des moyens internes à l’entreprise s’avère une gageure – et l’OCDE dans ses principes direc- teurs estime qu’il « peut s’avérer parfois impraticable d’accéder à certaines infor- mations » – le recours systématisé à des ressources qualifiées rend cela en vérité tout à fait praticable. Evaluer la corruption dans une entre- prise ou un secteur donnés par le seul recours aux entretiens avec du personnel toujours en poste et aux indices de perception est une démarche largement incomplète. Rechercher des conflits d’intérêts à 5000 km d’un siège par moyens élec- troniques ou téléphoniques ne mène pas plus loin. Evaluer la probité et la sincérité d’un acteur économique localisé dans un Etat prédateur à sa capacité à dévoiler sans réticence ses comptes est un écueil dans lequel tombent des acteurs jouissant eux du cadre d’un Etat protecteur. Les professionnels du renseignement économique experts de zones sau- ront eux combler le delta d’informa- tion stratégique manquant et analy- ser finement le risque. Les responsables de la conformité et les dirigeants dont ils relèvent gagneraient à être beaucoup plus exigeants en matière de renseigne- ment et, bien entendu, à l’égard de ceux y concourant. Connaître la méthodologie du prestataire Obligation de moyens

(moyens déployés, diversité effective des sources, respect des données personnelles, refus d’ « instruire à charge » un tiers) et les conditions de recueil du renseignement sont des éléments clés de leur apprécia- tion et des risques induits. Confier le pilotage d’un audit de conformité à un cabinet n’ayant pas participé au préalable à la validation d’un parte- naire ou à l’intermédiation avec des autorités étrangères relève égale- ment du bon sens. Examinant la cartographie des risques d’une entreprise contrô- lée, l’AFA s’est montrée pointilleuse demandant une plus fine granularité. Si de telles exigences se confirment, faire l’impasse sur le renseignement nuira immanquablement à la crédibi- lité des dispositifs en place. • Sous l’impulsion de règlementa- tions, les responsables de la sureté, de la RSE puis de la conformité sont montés en puissance. Les profession- nels de l’intelligence économique dans l’entreprise et dans son éco- système verront-ils à leur tour leur valeur reconnue? • La sous-représentation dans les services conformité de personnels aguerris à lever des lièvres et identi- fier l’arbre cachant la forêt peut ren- forcer le sentiment qu’à l’instar de la raréfaction de sanctions judiciaires et de la faible exigence en moyens d’investigation, ces dispositifs faci- litent le dédouanement d’acteurs économiques.

47 FINANCE&GESTION | Juillet Août 2020

1— Lire Le droit, outil d’influence et de coercition, Conflits, septembre 2019. 2— Principes directeurs à l’intention des entreprises multinationales (2008, màj 2011). 3— Signing : signature inconditionnelle, closing : transfert de propriété

POINTS À RETENIR •La cartographie des risques et leurs outils de pilotage sont désormais bien maitrisés •Les moyens d’investigation privés permettent de sécuriser les entreprises à n’importe quelle étape d’un projet •Repérer des pratiques d’affaires déviantes dans les pays émergeants requiert un savoir-faire •Relever l’exigence de renseignement économique renforcera la crédibilité des acteurs économiques et institutionnels engagés pour l’assainissement des affaires

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